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"Une croissance infinie dans un monde fini" est un joli slogan, mais le comportement de la croissance sur un horizon de temps infini est une question sans intérêt
Olivier Simard-Casanova
Nancy, Lorraine, France
Économiste, data scientist, conférencier et auteur indépendant
Chère membre Plus, cher membre Plus,
J’ai publié deux numéros la semaine dernière à propos de la critique que les économistes baseraient leur discipline sur une "croissance infinie" incompatible avec une planète de taille finie. Dans le premier, j’argumentais que "la croissance infinie" n’a rien d’une hypothèse fondamentale de la science économique. Dans le second, j’expliquais en quoi la "croissance infinie" que l’on trouve bien dans les modèles de croissance endogène n’est pas du tout ce qu’elle semble être.
Pour le numéro d’aujourd’hui, j’aimerais discuter d’un troisième problème de cette critique : ça n’a aucun intérêt de s’intéresser au comportement de la croissance à l’infini.
À ma connaissance, rien n’existe avec une durée de vie infinie. À part peut-être l’Univers – et encore, on n’en sait rien. Pour le reste, les étoiles meurent, les trous noirs s’évaporent, les planètes se font engloutir par leurs étoiles. Le vivant a une durée de vie encore plus courte – et l’humanité elle-même n’existe pas à l’infini.
Ce qui me dépasse, dans ces discussions autour du comportement de la croissance à l’infini, c’est que même une durée très, très longue (à l’échelle de l’humanité comme à l’échelle de l’Univers) n’est rigoureusement pas une durée infinie. Quelques décennies, quelques siècles, quelques millénaires – ou des centaines de milliards d’années : c’est beaucoup, mais ça n’est toujours pas l’infini.
Pour dire les choses autrement : on s’en fiche, du comportement de la croissance à l’infini. La vraie question, c’est de comprendre le comportement de la croissance à l’horizon de temps (fini) qui nous intéresse. Dans cinq ans, dix ans, cent ans – en fonction de la question de recherche que l’on se pose.
Je veux bien entendre que ceux qui prétendent critiquer les économistes avec cet argument de "les économistes supposent une croissance infinie" ne raisonnent pas forcément eux-mêmes à l’infini. Mais même si les économistes faisaient reposer leurs raisonnements sur une "croissance infinie" (ce qu’ils ne font pas), ça resterait sans importance. Je ne comprends pas pourquoi il y a une telle excitation autour d’une question sans le moindre intérêt.
"Les économistes supposent une croissance infinie dans un monde fini" est un joli slogan, percutant – mais c’est un slogan. Pas un argument, encore moins une critique pertinente. On est dans ce que j’appelle la pensée McDo, ou le prêt-à-penser : des formules toutes faites, qui donnent l’impression de dire des choses profondes, mais qui n’ont aucun sens lorsqu’on les examine en détail. C’est à mon sens un slogan d’autant plus paresseux et inutile que plus on s’éloigne dans le temps, plus la marge d’incertitude des prédictions augmente – au point que passé un certain seuil, littéralement tous les scénarios sont raisonnablement envisageables. Et je ne connais pas un seul économiste qui prétend le contraire.
Je range ce slogan dans le même tiroir que "les économistes ne sont jamais d’accord sur rien", "la science économique est une idéologie néolibérale" ou "la science économique, ce sont les keynésiens versus les libéraux". De beaux arguments de vente qui dissimulent une belle dose de vide.
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